Seul
« En mer, je sais pourquoi je suis seul, je me sens Homme et j’ai l’impression d’exister ».
C’est la fin de la saison. Les touristes ont déserté les plages et le pont du voilier. Alain, notre skipper, ramène le bateau. Il est seul, à la barre. Le marin a pris deux ris dans la grand-voile. Ça cartonne. Un grain menace.
Seul ? Sans doute. Mais relié, connecté à tout ce qui l’entoure. Tout d’abord au bateau qu’il écoute, qu’il observe, qu’il ressent. Ses oeuvres vives frémissant au choc de la vague. Son gréement mêlant sa voix à celle du vent. Si le bateau souffre, le marin souffre avec lui.
Et puis il y a le ciel.
Le skipper l’intègre à sa conscience. La course des nuages, le moindre changement dans leur apparence. Le soleil, à l’horizon, décline. Les couleurs changent, la lumière, avant de disparaître complètement, éblouit le regard affûté du timonier.
Le skipper et la mer
Enfin, la mer.
Le skipper et la mer, c’est une vieille histoire. Un peu comme un vieux couple. Et il sait à présent deviner ses humeurs. À la manière du vieux d’Hemingway, le skipper connaît la mer comme « quelque chose qui dispense ou refuse de grandes faveurs ; et si la mar se conduit comme une folle, c’ est parce qu’elle ne peut faire autrement : la lune la tourneboule. » Parfois, il sait prendre le large quand elle se fait trop exigeante.
Ce soir, il se sent bien, en accord avec la mer, le ciel, le bateau. Pourtant, il a conscience qu’il ne doit pas traîner, aller au-delà de la contemplation. C’est pourquoi il agit, tous ses sens en éveil. Et ses mains, ses yeux, son corps tout entier entrent dans la cadence imposée par la mer.
Publié par Sylvie
Alain Godel8 octobre 2019
Sylvie tu arrives à écrire la nature, tu arrives à écrire le chemin du voilier, les sentiments du marin au plus profond de lui-même , le bateau n'est pas ivre mais tu nous enivres.
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